«La tête dans les étoiles, les pieds sur terre.» C’était le titre de mon 53e kaléidoscope, consacré à un livre que je ne cesse de feuilleter: « J’ai vu une fleur sauvage» sous-titré, herbier de Malicorne. Hubert Reeves, son auteur, qui vient de rejoindre définitivement les étoiles est beaucoup plus connu pour ses ouvrages sur l’astronomie. C’est en 1981 que le grand public découvre ce scientifique généreux, immédiatement reconnaissable avec sa longue barbe, son sourire malicieux et son accent chantant du Québec. Après avoir été refusé par 30 éditeurs, son premier livre Patience dans l’azur ( titre emprunté à Paul Valéry) se vendra à plus d’un million d’exemplaires. Trois ans plus tard Poussières d’étoiles, nouveau succès avec un grand livre illustré de sublimes photos du ciel. Il deviendra en 2002 un spectacle à la cité des sciences. Suivront une trentaine d’ouvrages qui montreront à des millions de personnes le chemin des étoiles et du cosmos. Ce généreux vulgarisateur a donné des milliers de conférences, des chroniques à la radio qu’on réécoute avec bonheur et a participé à de multiples émissions à la télévision. En écoutant Hubert Reeves nous avions le sentiment de comprendre l’univers et ses dons de pédagogue éclatent dans un petit livre intitulé L’univers expliqué à mes petits-enfants.
J’aime bien les deux niveaux de lecture -piste rouge ou piste verte- (j’étais le plus souvent sur la piste verte!) de L’heure de s’enivrer, sous-titré l’univers a-t-il un sens? et le clin d’œil à Charles Baudelaire que je ne résiste pas au plaisir de citer in-extenso :
« Il faut être toujours ivre, tout est là ; c’est l’unique question. Pour ne pas sentir l’horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.
Mais de quoi ? De vin, de poésie, ou de vertus à votre guise, mais enivrez-vous !
Et si quelquefois, sur les marches d’un palais, sur l’herbe verte d’un fossé, vous vous réveillez, l’ivresse déjà diminuée ou disparue , demandez au vent, à la vague, à l’étoile, à l’oiseau, à l’horloge ; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est. Et le vent, la vague, l’étoile, l’oiseau, l’horloge vous répondront, il est l’heure de s’enivrer ; pour ne pas être les esclaves martyrisés du temps, enivrez-vous, enivrez-vous sans cesse de vin, de poésie, de vertu, à votre guise. »
Au fil des années, Hubert Reeves était de plus en plus inquiet sur l’état de notre petite planète perdue dans l’univers …«Je pense que L’humanité n’est pas nécessairement la favorite de la nature, qu’elle peut très bien disparaître, et que nous ne sommes pas une espèce sacrée: il y a eu dix millions d’espèces sur terre jusqu’ici et neuf millions ont disparu. Nous ne sommes pas une espèce « élue », comme on l’a cru pendant longtemps, la nature peut très bien se passer de nous. D’ailleurs, elle ne nous éliminera pas : c’est nous qui pourrions nous éliminer. Et si nous faisons cela, la nature ne sera pas particulièrement en deuil. Elle continuera de développer d’autres espèces, et ces dernières seront, espérons-le, plus en mesure de se préserver.»
Et il ajoutait:” Aujourd’hui, l’homme mène une guerre contre la nature, s’il gagne, il est perdu”.
En 2008, dans Je n’aurai pas le temps, son testament avant l’heure ( de s’enivrer!) il montrait qu’astronomie et écologie étaient les deux faces de notre existence : « L’astronomie, en nous racontant l’histoire de l’Univers, nous dit d’où nous venons, comment nous en sommes venus à être ici aujourd’hui. L’écologie, en nous faisant prendre conscience des menaces qui pèsent sur notre avenir, a pour but de nous dire comment y rester. »
Des étoiles aux nuages, il n’y a qu’un pas -ou un rayon de lune ou de soleil- et mon avant-dernier kaléidoscope vous a inspirés: merci à Véronique et Bernard qui m’apprennent qu’en cherchant à reconnaître des formes dans les nuages, je me livrais sans le savoir à la paréidolie! Et je vous invite à lire ( K247) les commentaires « paréidoliques » de Bernard.
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