Le 2 décembre 2010 à Zurich, c’est la stupeur quand le président de la FIFA annonce que c’est le Qatar qui organisera la 22e édition de la coupe du monde en 2022.
12 ans plus tard, à la veille de la compétition, les manchettes des journaux sont éloquentes.
“Mondial de la honte au Qatar : un sursaut citoyen.”
“Le Qatar a déjà perdu.”
“Le mirage vert du Qatar.”
“Mondial au Qatar : la coupe est pleine.”
“Travailleurs migrants au Qatar, près de 70 % des décès inexpliqués.”…
Et “Libération” -qui a toujours l’art de la formule- titre à la une ce samedi 19 novembre:”Le vilain petit Qatar”!
Comment a-t-on pu attribuer cette compétition mondiale à un micro-état de moins de trois millions d’habitants ( dont 80 à 90 % de résidents immigrés) sans tradition footballistique ?
La France n’a pas joué un rôle glorieux dans cette affaire avec Nicolas Sarkozy et Michel Platini à la manœuvre. Le parquet national financier a ouvert fin 2019 une information judiciaire sur l’attribution de ce mondial et de forts soupçons de corruption.
Il est évidemment trop tard pour boycotter cet événement mais il n’est pas trop tard pour ternir la belle image que le Qatar, principal fournisseur de gaz de la planète, veut se donner.
Il n’est pas trop tard pour dire que c’est au prix de la sueur, du sang et des larmes de centaines de milliers d’”esclaves”à qui on a confisqué leurs papiers pour qu’ils ne puissent pas partir, que nous pourrons tranquillement regarder les matchs.
Il n’est pas trop tard pour entendre les témoignages glaçants d’êtres humains contraints de travailler sous une chaleur accablante pour un salaire de misère, mal nourris, mal-logés. Non seulement ils ne verront pas les matchs dans les stades qu’ils ont construits -ou qu’ils vont nettoyer- mais, la plupart du temps, il n’y a même pas de télévision dans leurs insalubres gourbis pour les regarder.
Il n’est pas trop tard pour s’indigner de la mort de plus de 6500 ouvriers sur les chantiers pharaoniques depuis 2010, d’après l’enquête du journal “The Guardian”. Des chiffres probablement en-dessous de la réalité selon de nombreuses ONG.
Il n’est pas trop tard pour dénoncer l’aberration que représente la construction de huit stades géants climatisés dans un pays qui a le pire bilan carbone de la planète: le Qatar consomme l’équivalent de neuf planètes ( voir K196 le nouveau jour du dépassement )
Il n’est pas trop tard pour dénoncer la gigantesque pollution des avions, seul moyen de transport pour les spectateurs qui emprunteront des vols depuis Riyad ou Dubaï. On annonce plus de 150 vols allers retours quotidiens pendant le mois du mondial.
Il n’est pas trop tard pour dénoncer le sort réservé aux femmes -et aux personnes LGBT- dans l’émirat.
Il n’est pas trop tard pour s’opposer aux candidatures pressenties pour 2030 et 2034 des “champions des droits de l’homme et de la sobriété énergétique” que sont la Chine et l’Arabie Saoudite.
Et il n’est pas trop tard pour boycotter les jeux asiatiques d’hiver qui viennent d’être attribués à l’Arabie Saoudite en 2029! Même si les travaux pour construire la mégalopole futuriste de Neom en plein désert ont déjà commencé.
Alors que la planète brûle, le monde du foot va, pendant un mois, regarder ailleurs.
Laisser un commentaire