Je m’étais bien promis de consacrer ce kaléidoscope à un sujet moins grave que la pandémie, le climat ou les Ouïgours… Et patatras! voilà que sort cette semaine le rapport annuel de l’ONG britannique Oxfam.
Il m’avait déjà bien mis en colère l’an dernier et il y a deux ans ( K38) et je me disais naïvement que cette satanée pandémie allait, quelque peu, rogner les faramineux profits des puissants de ce monde. Que nenni ! Jugez vous-mêmes.
” Les 10 personnes les plus riches de la planète- dont le français Bernard Arnauld à la tête de l’empire du luxe LVMH- ont vu leur fortune augmenter de 540 milliards de dollars depuis le début de la pandémie.”
Entre mars et décembre la fortune de Bernard Arnault s’est accrue de 44 milliards d’euros, soit un bond de 41% et le cours de LVMH a augmenté de 25%: vive la Covid et merci patron !
“En France les 175 milliards d’euros qui ont gonflé le patrimoine des milliardaires entre mars et décembre 2020 pèsent deux fois le budget de l’hôpital public.” écrit cette semaine Marie Charrel dans le journal Le Monde. De quoi hurler quand on sait que trois français sur dix ne se soignent pas pour des raisons financières… et que dans le même temps l’ensemble des niches fiscales coûte à la collectivité 100 milliards d’euros chaque année.
Après la crise économique de 2008, il avait fallu cinq ans pour que les milliardaires se refassent la cerise ( de cerise à crise, une seule lettre! ) et retrouvent leur niveau de richesse.
Et pendant ce temps-là , dans le monde entier, des millions de personnes ont basculé dans la pauvreté. En France, à l’automne 2020, les associations caritatives estimaient le nombre de bénéficiaires de l’aide alimentaire à plus de 8 millions, contre 5,5 millions les années précédentes.
“La pandémie a privé les enfants vivants dans les pays les plus pauvres de près de quatre mois de scolarisation, contre six semaines dans les pays à revenu élevé” affirme le rapport et cela pourrait effacer 20 ans de progrès en matière d’éducation des filles dans le monde.
Cette semaine le Conseil Économique, Social et Environnemental formule 25 propositions visant à lutter contre la grande pauvreté et l’éradiquer à l’horizon 2030. Un objectif ambitieux et atteignable estime le CESE. Encore faut-il qu’on s’en donne les moyens: moins de 1% de l’actuel plan de relance est dédié à la lutte contre la pauvreté.
Détailler tout ce qu’il faudrait faire dépasse largement le cadre de ce kaléidoscope, mais quelques mesures de bon sens sont à mettre en place de toute urgence:
-Investir massivement dans les services publics – santé, éducation, protection sociale-pour assurer les besoins de base.
-Revaloriser les minima sociaux et les bas salaires, à commencer par les métiers du secteur du soin où les femmes sont majoritaires.
-Faire en sorte que les plus riches et les grandes entreprises payent leur juste part d’impôts.
-Mettre en place des contreparties sociales et écologiques contraignantes pour les grandes entreprises.
Mais hélas, à la lumière des mesures prises depuis un an, je crains vraiment que l’impuissance face aux inégalités soit un choix politique.
Et pour terminer sur une note plus optimiste, je vous conseille de regarder le documentaire de Valérie Müller consacré à un atelier de danse réalisé par le chorégraphe Angelin Preljocaj avec des détenues de la prison des Baumettes. Danser sa peine est un film délicat et émouvant, un “pied de nez aux barreaux” comme le dit Sylvia, une des danseuses.
Angelin Preljocaj est décidément à l’honneur dans notre petite lucarne grâce à un autre documentaire intitulé Angelin Preljocaj, danser l’invisible.
À vos “replay” sur France.TV.
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