Le 11 septembre 2001, tout le monde se souvient du moment où il a appris l’attentat terroriste sur les tours jumelles de New York et la déflagration guerrière consécutive.  

     Mais ceux qui, comme moi, avaient une vingtaine d’années, le 11 septembre 1973, se souviennent avec rage, émotion du coup d’état au Chili du général Pinochet et de la junte militaire. Le triste anniversaire du demi-siècle a été peu commémoré… et pourtant il me semble nécessaire de ne pas oublier ce traumatisme qui a laissé des traces profondes.

   50 ans déjà! Je me souviens que c’est la radio qui m’a appris la terrible nouvelle. Trois ans plus tôt, le 4 septembre 1970, nous étions nombreux à nous réjouir de l’élection de Salvador Allende, qui avait su unir la gauche chilienne pour l’emporter de justesse.

Je me souviens que les forces conservatrices au Chili, soutenues par les USA de Richard Nixon ont tout fait pour saboter une expérience démocratique qui aurait pu faire tache d’huile en Amérique latine.

   Tout le monde savait que les services secrets américains s’étaient évertués pendant trois ans à déstabiliser le régime de Salvador Allende et que la grève des camionneurs chiliens, était pilotée et financée par la CIA.

   Je me souviens de la dernière photo du président Salvador Allende, casque sur la tête, assiégé dans le palais présidentiel de la Moneda, bombardé par l’armée de l’air chilienne, et de ses dernières paroles : « j’ai la certitude que le sacrifice ne sera pas vain et qu’au moins ce sera une punition morale pour la lâcheté et la trahison. »

   Je me souviens de la mort, moins de deux semaines après le coup d’état, de Pablo Neruda, prix Nobel de littérature, poète immensément populaire au Chili et engagé aux côtés de l’unité populaire et que son enterrement avait été l’occasion d’une des premières manifestations de résistance à la dictature. On considère aujourd’hui qu’il aurait pu être assassiné.

   Je me souviens que la dictature est responsable de la mort de 3200 personnes et de l’assassinat de Victor Jara, ( 50 ans après sa mort, sept militaires viennent d’être condamnés) icône de la chanson protestataire, massacré par ses tortionnaires et jeté dans un terrain vague. L’autopsie révélera 56 fractures et 44 impacts de balles.

   Je me souviens que les «Chicago boys», des économistes chiliens influencés par Milton Friedman ont transformé le pays en laboratoire du néolibéralisme.

   Pour comprendre la situation politique du Chili dans les années 70, il faut voir La bataille du Chili le documentaire en trois parties -visible en replay sur Arte.TV- du cinéaste chilien Patricio Guzmán. Il avait 29 ans à l’arrivée d’Allende et montre à la fois l’énergie et la liesse populaire et la haine de la bourgeoisie attachée à ses privilèges allant jusqu’à l’organisation de la pénurie de denrées alimentaires de première nécessité pour déstabiliser le régime.

  «  Podran cortar todas las flores pero no podran detener la primavera.

Ils pourront couper toutes les fleurs mais ils ne pourront pas arrêter le printemps. »

PABLO NERUDA 

One thought on “Kaléidoscope 246: Un 11 septembre peut en cacher un autre.

  1. A voir également, un autre très bon documentaire cette année de P.Guzman sur l’explosion sociale de 2019 “Mon pays imaginaire” ! Pour ceux qui sont abonnés à la chaine du documentaire TENK, le documentaire “Le pacte d’Adriana” de Lizette Orozco : Que faire quand une tante admirée se révèle avoir été directement complice de la dictature de Pinochet ?

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