2020, 20-20 , vingt sur vingt, vain vingt, vint vin…

Ce millésime tout en rondeurs se prête au jeu de mots et nous fait aussi penser à la Rondeur des jours chère à Jean Giono dont nous fêterons en 2020 les 50 ans de la disparition. J’aurai l’occasion, cette nouvelle année, de reparler de l’œuvre insondable et complexe de cet immense prosateur si poétique, à qui le MUCEM de Marseille consacre une très belle exposition rétrospective qui s’arrête malheureusement le 17 février. Ceux qui ne pourront, d’ici là, se rendre à Marseille se consoleront avec la lecture du magnifique catalogue d’exposition qui nous fait pénétrer dans l’univers de ce grand créateur qui écrivait dans son journal en 1936: “Ce que j’ai à dire je l’écris, le reste c’est zéro.” J.M.G. Le Clézio, Alice Ferney, Sylvie Germain … y rendent un bel hommage à Jean Giono et il ne faut pas passer à côté du texte de Philippe Claudel : Un roi en hiver (consacré au roman Un roi sans divertissement, peut-être le plus beau et , à coup sûr le plus énigmatique de Giono .) dresse un magnifique portrait de Langlois:”un des personnages les plus impénétrables de notre littérature, une figure du mystère et de la souffrance, de l’élégance et du crottin, dont la mélancolie existentielle lui fera au final préférer à son cigare un tabac définitif.”

Mais ce qu’il y a peut-être de mieux à faire c’est de laisser la parole à Jean Giono qui commence ainsi Rondeur des jours:

“Les jours commencent et finissent dans une heure trouble de la nuit. Ils n’ont pas la forme longue , cette forme des choses qui vont vers des buts : la flèche, la route, la course de l’homme. Ils ont la forme ronde, cette forme des choses éternelles et statiques: le soleil, le monde, Dieu. La civilisation a voulu nous persuader que nous allons vers quelque chose, un but lointain. Nous avons oublié que notre seul but, c’est vivre et que vivre nous le faisons chaque jour et tous les jours et qu’à toutes les heures de la journée nous atteignons notre but véritable si nous vivons. Tous les gens civilisés se représentent le jour comme commençant à l’aube ou un peu après, ou longtemps après, enfin à une heure fixée par le début de leur travail ; qu’il s’allonge à travers leur travail, pendant ce qu’ils appellent “toute la journée”; puis qu’il finit quand ils ferment les paupières. Ce sont cela qui disent : les jours sont longs.
Non, les jours sont ronds.
Nous n’allons vers rien, justement parce que nous allons vers tout, et tout est atteint du moment que nous avons tous nos sens prêts à sentir. Les jours sont des fruits et notre rôle est de les manger, de les goûter doucement ou voracement selon notre nature propre, de profiter de tout ce qu’ils contiennent, d’en faire notre chair spirituelle et notre âme, de vivre. Vivre n’a pas d’autre sens que ça.”

 J'espère de tout cœur que l'an qui vient ne sera pas vain et que nous saurons profiter de la rondeur des jours et du conseil de Jean Giono dans Angelo, ce livre écrit en six jours où apparaît pour la première fois le héros du Hussard sur le toit, Angelo Pardi :

“Il est incontestable que le plus grand bonheur qu’on puisse atteindre sur cette terre, c’est de rester jeune. Rien ne peut remplacer la faculté d’enthousiasme.”

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