Il y a 400 ans naissait un certain Jean-Baptiste Poquelin, plus connu sous le nom de scène qu’il prendra à 21 ans après la création de la troupe de l’Illustre-Théâtre.
   Les personnages de Molière sont devenus universels et nous connaissons tous Scapin, Harpagon, Tartuffe, Dom Juan ou Monsieur Jourdain le bourgeois gentilhomme. Molière nous a fait comprendre que le rire est aussi “sérieux” que la tragédie. Il rit et nous fait rire des “misères de l’homme” au sens pascalien du terme. Son irrévérence face aux puissants, face au pouvoir des pères abusifs est toujours actuelle et Molière s’en prend avec force au patriarcat : ce sont en effet les pères de famille qui introduisent le désordre dans leur famille, Harpagon avec son avarice, Monsieur Jourdain avec sa volonté de paraître, Argan avec son hypocondrie et surtout Orgon qui s’est à tel point entiché du faux dévot Tartuffe qu’il lui fait régenter sa famille, qu’il lui lègue ses biens et veut lui donner la main de sa fille.   Sans être féministe, Molière donne aux femmes de très beaux rôles et les servantes sont souvent à la manœuvre pour  s’opposer à la folie des maîtres. C’est Dorine qui, la première, a mis à jour les fourberies de Tartuffe et je ne résiste pas au plaisir de vous rappeler cette scène qui l’oppose au faux dévot.
Tartuffe :                 
                                    Ah! Mon dieu, je vous prie, 
Avant que de parler, prenez-moi ce mouchoir. 

Dorine:
Comment?

Tartuffe:
                Couvrez ce sein que je ne saurais voir.
Par de pareils objets les âmes sont blessées, 
Et cela fait venir de coupables pensées.

Dorine:
Vous êtes donc bien tendre à la tentation, 
Et la chair sur vos sens fait grande impression ! 
Certes, je ne sais pas quelle chaleur vous monte, 
Mais à convoiter, moi, je ne suis point si prompte, 
Et je vous verrais nu du haut jusques en bas
Que toute votre peau ne me tenterait pas.   


  L’occasion nous est donnée de nous plonger dans l’histoire d’un homme dont nous n’avons aucun écrit.

  En 1977, Ariane Mnouchkine décide, avec sa troupe du Théâtre du Soleil de consacrer à Molière un film, réalisé avec 120 comédiens, 600 participants, 1300 costumes, 220 décors et deux années de travail.
   Les quatre heures du film -qui passent à toute allure- nous font découvrir l’enfance de Jean-Baptiste auprès d’une mère adorée qui meurt lorsqu’il a dix ans, sa décision à vingt ans (difficile à encaisser par son père!) de devenir comédien. Pendant plus de dix ans il va avec sa troupe sur les chemins de la France de Louis XIV, où la misère côtoie la plus indécente richesse. 
  Je me souviens avec émotion de ma première vision du film d’Ariane Mnouchkine “Molière ou la vie d’un honnête homme” à sa sortie en 1978, beaucoup mieux accueilli par le public que par la critique. Je me souviens de l’interminable agonie de Molière, à la fin de la quatrième représentation du “Malade imaginaire” ce 17 février 1673, porté, dans les escaliers, par les comédiens de sa troupe. La lancinante mélodie du Roi Arthur d’Henry Purcell résonne encore en moi et, plusieurs décennies après, je ne peux l’écouter sans revoir cette scène inoubliable. Toute la troupe du Théâtre du Soleil porte le film avec une énergie et une passion débordante, à l’image de Philippe Caubère qui incarne Molière ( et qui a donné la semaine dernière au théâtre de Vienne sa fougueuse vision des “Lettres de mon moulin”).       On est impressionné par cette fresque au souffle visionnaire, par ces clair-obscur qui donnent l’impression au spectateur d’être au cœur de la peinture flamande.      Les heureux habitants de Vienne -où Molière a probablement joué au cours de ses tournées en province- auront le privilège de voir la version restaurée du film d’Ariane Mnouchkine pour la première fois dans un cinéma de province.   Notez sur vos tablettes cette soirée exceptionnelle à l’Amphi -sur très grand  écran grâce à Cinéclap le mardi 12 avril à 18h30.


Si vous n’êtes pas libre le 12 avril vous pouvez vous consoler en regardant le film sur la petite lucarne d’Arte.TV en replay.

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