Quand j’ai envoyé le 5 mai 2018 mon premier kaléidoscope – consacré à l’esclavage – je ne me doutais pas que, trois ans plus tard, je vous en aurais fait parvenir 145 !
Au départ, vous étiez une petite cinquantaine, aujourd’hui presque deux cents. Merci à ceux qui me disent qu’ils tiennent à ce rendez-vous hebdomadaire. Merci à ceux qui transfèrent parfois mes envois à leurs amis. Merci à ceux qui m’apportent corrections, précisions, commentaires, éclairages stimulants, témoignages… que je peux intégrer à ce blogue offert y a six mois par notre fils Quentin et qui abrite tous mes kaléidoscopes. Vous êtes de plus en plus nombreux à le visiter et vos commentaires et critiques sont les bienvenus.
Pour fêter le premier anniversaire (K50) j’avais procédé à une sorte d’inventaire à la Prévert de la diversité des sujets abordés. Depuis un an, la palette s’est réduite et je rêve de pouvoir reparler de films nouveaux, d’expositions, de concerts, de rencontres en vrai avec des auteurs, des artistes… Je rêve de ne plus avoir à parler d’inégalités, d’injustice, de violence, de racisme, de destruction de la planète, de migrants pourchassés…
Kaléidoscope: comme je le disais il y a trois ans, j’ai toujours aimé ce mot et ce qu’il représente, l’idée, selon son étymologie, de regarder une belle image . J’ai passé beaucoup de temps, enfant, à regarder dans la lumière du ciel ces fragments colorés et changeants.
Je vais tenter encore d’essayer d’aiguiser ma curiosité et la vôtre, d’essayer d’être tour à tour grave et léger, d’aller à sauts et à gambades comme le dit plaisamment Montaigne … en espérant que nos sauts et nos gambades se libèrent de la pandémie qui les entrave depuis plus d’un an.
Au menu de la semaine: drogue, tabac, pétrole, inégalités et nouvelle donne. Les gambades au prochain numéro !

Premier fragment : “Projet Cartel: Mexique, le silence ou la mort.” Le documentaire programmé ce mardi sur France 5 (et visible en replay) met en lumière le combat de la journaliste mexicaine Regina Martinez, probablement assassinée pour avoir montré les liens entre trafiquants de drogue et politiciens de l’état de Vera Cruz. Le reportage montre aussi le travail d’intérêt public mené par l’association Forbidden Stories regroupant des reporters des principaux médias internationaux. On y apprend, grâce au débat suivant le documentaire que, même en France, des journalistes enquêtant sur des sujets sensibles, sont menacés de mort.

   Deuxième fragment : Un récent article de trois pages paru dans Le Monde 

https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/04/14/un-avenir-sans-fumee-la-guerre-secrete-de-philip-morris-contre-l-oms_6076704_3244.html “La guerre secrète de Philip Morris” dénonce le combat du plus grand cigarettier de la planète contre l’OMS et les experts de la lutte antitabac. Rappelons que cette drogue légale tue 7 millions de personnes chaque année. Pour ce faire Philip Morris a créé une “Fondation pour un monde sans fumée” … mais pas sans enfumage! On peut dire que la multinationale met le paquet !

Troisième fragment : La Croix l’hebdo titre : “Ouganda, Total dans le piège de l‘or noir.”
(https://www.la-croix.com/Monde/Ouganda-Total-piege-lor-noir-2021-04-23-1201152289 ) et mène une remarquable enquête de 12 pages sur le plus grand projet pétrolier du monde lancé cette année par la multinationale française Total. Les ONG dénoncent les impacts destructeurs du projet sur les droits humains, le climat et l’environnement.
En même temps -comme dirait l’autre- Total, avec l’argent des plans de relance de la BCE (banque centrale européenne) extrait en Argentine des gaz de schiste par la dévastatrice (et interdite en France) fracturation hydraulique.
Avec tout ça Total ambitionne de devenir une “supermajor verte”.
Philip Morris et Total : le top du green washing !

Quatrième fragment : passionnant débat dans la revue Études du mois de mars entre Gaël Giraud et Thomas Piketty intitulé “Le capitalisme est-il réformable ?”
Extraits : Gaël Giraud : “pour être éligible à un appel d’offres public, une entreprise devrait au préalable être au carré sur un certain nombre de questions : l’ouverture aux handicapés, la part des femmes et des hommes dans les lieux de pouvoir… mais aussi par exemple sur l’échelle des revenus. Pour commencer, on pourrait conditionner l’obtention d’argent public, l’argent du contribuable, à un écart des salaires de un à 100 (il est de un à 1000 dans certaines grandes banques…) puis d’un à 50, etc.”
Thomas Piketty va plus loin: “Je propose un héritage pour tous de 120 000 € à 25 ans. Actuellement, la moitié de la population ne reçoit rien, n’hérite de rien et les autres de tout.”
Ce ne sont que deux pistes de réflexion parmi tant d’autres dans ce dialogue riche (!) et stimulant.

Cinquième fragment : On n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise et on peut se demander si Joe Biden n’est pas abonné à la revue Études ! Celui que l’affreux Trump surnommait “Joe l’endormi” se révèle au bout de cent jours beaucoup plus jeune et beaucoup plus réformateur que son homologue français qui refuse, à tout prix, de taxer les grandes fortunes. Emboîtant le pas de Roosevelt (voir K97), il appelle les plus riches à payer leur juste part et veut taxer plus fortement les multinationales. Il parvient à se faire applaudir par les partisans de Bernie Sanders, l’équivalent de notre Mélenchon !
Le titre du Monde de ce 30 avril sur six colonnes à la une ? Joe Biden engage la bataille contre les inégalités. On croit rêver et on espère que ce virus égalitaire sera contagieux !

Mon kaléidoscope fait relâche la semaine prochaine.

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