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KALÉIDOSCOPES !

Fragments culturels paraissant chaque samedi matin

 Kaléidoscope 284: Rediffusion de K14 sur Paul Vincensini.

       

Ce deuxième kaléidoscope aoûtien est une rediffusion d’un de mes premiers envois il y a tout juste six ans:

 Plein ciel

L’oiseau seul

a tout le ciel

pour s’étirer 

dans tous les sens.

   Ce poème de Paul Vincensini établissait un lien avec le kaléidoscope qui évoquait chardonnerets, traquets et autres passereaux. 

 ( voir ici mon 13ème kaléidoscope)

   La poésie de Vincensini comme celle de Prévert ou de René de Obaldia ( K32 et 175) est empreinte d’une légèreté qui n’a rien de superficiel. «La gravité est la racine de la légèreté. » disait Lao-Tseu, souvent cité par Jacques A. Bertrand.

   J’ai rencontré Paul Vincensini pour la première fois à l’époque où je faisais du théâtre. Je connaissais déjà sa poésie et “Moi dans l’arbre ” m’avait ravi. Il avait confié à notre troupe une pièce de théâtre au titre insolite ” La jambe qui chante”. Nous étions très fiers de sa confiance et très excités  à l’idée de créer ce spectacle… que nous n’avons pas réussi à monter, mais c’est une autre histoire. Je me souviens d’avoir participé à la réalisation de l’affiche de cette pièce originale dans le petit atelier de sérigraphie que possédait notre compagnie.

    Autant vous dire que j’étais heureux de rencontrer Paul Vincensini qui nous avait invités dans sa maison de Rochessauve en Ardèche. Je me souviens de son rire, de ses grosses lunettes et de son imposante moustache. Nous avons passé une soirée joyeuse dans cette maison fraîche des montagnes ardéchoises. Nous y avons rencontré Marcel Maréchal, alors au sommet de sa gloire théâtrale, qui créera “La jambe qui chante” dans une adaptation radiophonique pour France Culture en 1973.

   Paul Vincensini avait une haute idée de sa mission d’enseignant, multipliant les spectacles et festivals poétiques. En 1982, trois ans avant sa mort à l’âge de cinquante ans, il fut l’un des fondateurs de la maison de la poésie d’Avignon.

   J’aime sa vision insolite du monde, son humour proche de l’absurde, la concision de sa poésie qui fait la part belle à la nature. Il est un peu tombé dans l’oubli et je suis heureux que Maële Vincensini, sa petite-fille lui ait consacré un site dont le titre aurait certainement plu à son grand-père : Vlan d’la poésie.

Parmi les pépites que vous y trouverez j’ai choisi ces quelques textes:

Moisson 

Dans un champ de blé 

Avance une chevelure 

Qui lui ressemble 

Celle qui la porte 

N’a d’yeux que pour les oiseaux 

Qui fuient à son approche 

Et moi

Je ne vois qu’elle 

Toujours et Jamais

Toujours et Jamais étaient toujours ensemble 
ne se quittaient jamais. On les rencontrait 
dans toutes les foires. 
On les voyait le soir traverser le village 
sur un tandem. 
Toujours guidait 
Jamais pédalait 
C’est du moins ce qu’on supposait… 
Ils avaient tous les deux une jolie casquette 
L’une était noire à carreaux blancs 
L’autre blanche à carreaux noirs 
A cela on aurait pu les reconnaître 
Mais ils passaient toujours le soir 
et avec la vitesse… 
Certains d’ailleurs les soupçonnaient 
Non sans raison peut-être 
D’échanger certains soirs leur casquette 
Une autre particularité 
Aurait dû les distinguer 
L’un disait toujours bonjour 
L’autre toujours bonsoir 
Mais on ne sut jamais 
Si c’était Toujours qui disait bonjour 
Ou Jamais qui disait bonsoir 
Car entre eux ils s’appelaient toujours 
Monsieur Albert Monsieur Octave.

Moi dans l’arbre 

T’es fou

Tire pas

C’est pas des corbeaux 

C’est mes souliers 

Je dors parfois dans les arbres.

Et un dernier petit bijou de légèreté… pour la route céleste !

« Un vrai chemin est toujours tracé dans rien. Regardez les oiseaux. »


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