Bravo à ceux qui ont trouvé que l’auteur de cet amusant poème était René de Obaldia. Intitulé Chez moi, il inaugure Innocentines, ce recueil où vous trouverez d’autres pépites comme “You spique angliche “, “Petite ritournelle impériale” ou “Le plus beau vers de la langue française ” ( Le geai gélatineux geignait dans le jasmin ! ) et plein d’autres poèmes légers, drôles et parfois émouvants. Le recueil se termine par un “Happening concerté pour marionnettes et public de choix” intitulé “Alligators et kangourous “, une petite saynète frapadingue qui nous rappelle que le Comte René de Obaldia est aussi l’auteur d’une bonne trentaine de comédies dont l’inénarrable Du vent dans les branches de sassafras, “western de chambre” créé par le non moins inénarrable Michel Simon en 1965, patriarche dur à cuire qui doit faire face, entre autres, à des Indiens “hauts en couleurs!!!”. Sa première grande pièce “Génousie” sera montée par Jean Vilar au TNP en 1961.

René de Obaldia ne fait jamais rien comme tout le monde! À sa naissance à Hong Kong en 1918, on ne lui donne que quelques heures à vivre…et 100 ans plus tard, il est encore là, après avoir écrit à l’âge de quarante ans un roman intitulé “Le centenaire “! Il aime citer la phrase de Picasso: “Il faut beaucoup de temps pour devenir jeune” et un proverbe russe – à moins qu’il ne soit obaldien – “pour devenir centenaire, il faut commencer jeune”. Au moment d’écrire ses mémoires, à 75 ans, il les appelle Exobiographie, histoire de montrer qu’il se regarde comme si c’était une autre personne s’interrogeant sur l’incongruité de l’existence.
Cet anticonformiste pousse le paradoxe jusqu’à se faire élire en 1999 ( à plus de quatre-vingts ans ce qui moins original !) à l’Académie Française dont il est aujourd’hui le doyen.
Grâce à François Busnel qui avait organisé, il y a quelques années au théâtre du Rond-Point, une Grande Librairie consacrée à la langue française, j’avais eu la chance de le rencontrer, l’œil pétillant de malice et d’être témoin de sa vivacité d’esprit.

J’avais pu lui dire mon admiration pour Tamerlan des cœurs , un roman découvert à vingt ans, dans la collection 10/18, dont les pages s’effeuillent aujourd’hui comme pétales de marguerite. Dans sa belle postface Maurice Nadeau montre à quel point René de Obaldia est allé à l’école surréaliste : “Tamerlan des cœurs” est un roman de poète qui nous conduit de l’épopée de Roncevaux à la conquête du Mexique…sur les traces de Jaime, séducteur au nom prédestiné :”Seul le poète peut se tenir au-dessus de tous les genres et, quand il y descend, sur scène ou dans le roman, nous donne à voir ce que nous n’avons pas encore vu en les transformant subtilement de l’intérieur. Jaime-Tamerlan de Obaldia est ce poète.”

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